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Comment réussir l’ AFEST dans une PME ?

 

Comment réussir l’AFEST dans les petites structures où la réalité de tous les jours est justement l’absence de structure ?

Pourtant ce nouveau dispositif semble très adapté pour agir au plus près des besoins opérationnels, là où se joue la survie des PME au gré des humeurs des clients et des collaborateurs.

En théorie, l’ AFEST peut être considéré comme un investissement qui contribue aux résultats opérationnels. Mais dans la pratique, un dirigeant de PME comprend rarement ce que veut réellement dire un investissement.

Un dirigeant ordinaire veut faire fonctionner son entreprise avec un minimum de ressources.

Mais faire fonctionner une PME n’a rien à voir avec une PME qui fonctionne.

Une PME qui fonctionne possède un modèle et une structure : le dirigeant travaille sur son entreprise et non dans son entreprise. La très grande majorité des PME ne possède ni modèle ni structure, c’est pourquoi les patrons travaillent dans leur PME pour faire fonctionner le tout, au hasard des difficultés et des opportunités.

Les premiers veulent constituer un patrimoine à travers la valorisation de leur PME, les autres se créent un job et veulent gagner un revenu comme n’importe quel salarié, mais avec le luxe d’être leur propre patron.

Les PME qui fonctionnent résonnent en termes de bilan et d’actifs, les PME qu’il faut faire fonctionner – l’écrasante majorité – résonnent en termes de compte de résultat et de CA.

C’est pourquoi il y a de très grandes chances qu’une PME soit très sensible aux résultats opérationnels d’un AFEST, mais pratiquement sourde aux investissements nécessaires en termes de méthodologie.

D’un autre côté, l’AFEST est très souvent piloté par les professionnels de formation, dont le métier tourne autour de l’ingénierie pédagogique et des méthodes. Pour caricaturer, un patron de PME à table jugera la qualité des plats, un formateur jugera la qualité du menu.

La clé de réussite d’un dispositif AFEST se trouve justement dans ce no mans land, entre les besoins opérationnels d’une PME, et l’impératif de procéder par modèle et structure.

Comment faire alors pour apporter une démarche pédagogique là où les urgences constituent la norme ?

Comment prouver que l’AFEST va contribuer à faire des affaires, là où la norme consiste à se tirer d’affaires ?

Comment gérer les commanditaires ?

 

Il faut dès le départ être conscient de la différence d’ADN entre une PME peu structurée, et une grande entreprise ayant un organisme de formation interne.

Pour les grands organismes, la réussite de l’AFEST dépend du talent politique de ses promoteurs. Dans un premier temps, il va falloir convaincre les décideurs à refondre une partie de l’ingénierie de formation en mode AFEST. Il s’agit typiquement d’une question de gestion de changement que l’on retrouve dans les entreprises en transformation. Il faut sensibiliser, prouver à coup de projets pilotes et déployer en gérant les résistances internes au changement.

Avant la phase de déploiement, le service formation reste dans sa zone de confort, puisqu’il s’agit principalement d’intégrer l’AFEST dans les dispositifs en cours. Mais pendant la phase de déploiement, les sujets opérationnels prendront le dessus, et le service formation devra surtout canaliser et gérer les tuteurs et les coachs qui risquent de dévier par rapport aux parcours prévus. Et pour ce faire, il va falloir apprendre à raisonner en termes de résultats opérationnels, plutôt que de méthode pédagogique.

Dans les PME, il s’agit d’une toute autre affaire.

La réussite de l’AFEST dans une PME ne consiste pas à apporter de la méthode, mais des résultats. Il va falloir s’inspirer des métiers du conseil, avant même le démarrage de la formation.

Les sociétés de conseil pratiquent depuis longtemps une certaine forme d’apprentissage en situation de travail, sous forme de transfert de compétence.

Il s’agit de séquences courtes de formation terrain, mais généralement sans aucune ingénierie pédagogique. C’est un joyeux mélange de démonstrations, de feed-back et d’explications, le tout sans tenir compte des styles d’apprentissage, de l’analyse des pratiques ou des motivations du client. Après tout, les sociétés de conseil traitent avec un client, et non avec des apprenants.

Par ailleurs, le modèle de business d’une société de conseil consiste à valoriser l’expertise de leurs consultants. Ce qui a pour effet de transformer le consultant en un CV ambulant : il est là pour briller en son propre nom. Par conséquent les astuces et les tours de main seront jalousement gardés.

Le marché du conseil étant assez large, les sociétés de conseils doivent attirer et garder leurs consultants contre un salaire attractif en CDI. Le taux d’activité du consultant devient alors un paramètre crucial des résultats de l’entreprise, et le salaire d’un consultant non affecté à un projet devient rapidement problématique. Un client mal formé devient alors un client plus rentable, car obligé d’externaliser une partie des tâches vers les consultants de la société de conseil. C’est pourquoi le métier du conseil a par nature intérêt à rester proche des résultats opérationnels, tout en évitant de former les clients.

A contrario, le modèle de fonctionnement des organismes de formation étant orienté vers des prestations ponctuelles, ces structures sont adaptées à des taux d’activité en dents de scie. Les tarifs journaliers des formations sont alors supérieurs à ceux pratiqués dans le conseil, puisque le taux d’activité est plus faible. Et pour que le client puisse en avoir pour son argent, il va falloir lui transmettre des livrables. L’effet secondaire de ce modèle est la production de livrables au kilo, où l’on enfonce des portes ouvertes à coup de méthodes, de schémas et de process ampoulés.

En résumé, le consultant n’est pas un formateur, et le formateur n’est pas un consultant. Pourtant le titre de consultant-formateur prolifère sur le marché ; mais ne soyons pas dogmatiques, de nos jours on peut même être coiffeur-astronaute si le mot clé devient à la mode.

Quelle posture choisir alors pour convaincre un dirigeant de PME de la pertinence d’un projet AFEST ?

Pour ce faire, une méthode consiste à tenir compte des résultats opérationnels dans la conception même de l’AFEST, en se basant sur les niveaux 4 et 3 (résultats & comportements) de la méthode d’évaluation KirkPatrick.

Cette méthode permet au formateur (ou référent) d’utiliser les techniques de conseil, tout en gardant une casquette de formateur. En effet, il s’agit de formaliser des résultats et pratiques attendus en amont, ce qui est conforme à la posture d’un formateur. Si le formateur (ou référent) met une casquette de consultant pendant la formation, l’intention pédagogique risque d’être oubliée par le commanditaire de la formation.

En effet, n’oublions pas que l’AFEST reste une modalité de formation avec une intention pédagogique. Le fait de s’acharner à prouver la contribution de la formation aux résultats opérationnels, peut tout simplement faire oublier au patron de PME qu’il s’agit d’une formation, et non d’une prestation opérationnelle de conseil.

En conclusion, pour bien gérer les commanditaires d’une PME dans une démarche AFEST, il faut garder une posture de formateur, et utiliser quelques techniques de conseil en amont de la formation.

 

Comment gérer les sachants et les apprenants ?

 

Une fois l’AFEST bien calibré au niveau des commanditaires de la PME, il va falloir positionner les apprenants et surtout prévoir les parcours avec les sachants (tuteurs, coachs, facilitateurs).

La première difficulté sera l’analyse du travail des apprenants. Avec un peu de chance, les PME d’une certaine taille possèdent une fonction RH qui aidera à formaliser les apprentissages.

Dans les TPE par contre, non seulement les fiches de poste sont rares, mais le drame peut aller jusqu’à l’apprenant qui découvre sa raison d’être dans la société à l’occasion de l’AFEST !

Le bon positionnement de l’apprenant et la conception de son parcours demandent alors beaucoup de temps et de formalisme, c’est-à-dire les deux choses les plus surréalistes dans une TPE. Le commanditaire et l’apprenant s’attendent à participer à une formation, et non pas à une ingénierie pédagogique.

Pourtant sans une bonne analyse du besoin, sans la contractualisation des attendus et sans la formalisation des engagements des acteurs, l’AFEST risque de finir tôt ou tard en une sorte de management par procuration de l’apprenant.

Et si par malchance l’apprenant est un cadre, les séances de l’AFEST se transformeront en gestion des problèmes de management internes de la PME.

En ce qui concerne les tuteurs ou les coachs de l’apprenant, il existe deux cas de figures : d’un côté les sachants formés aux techniques pédagogiques terrains, et de l’autre les sachants sachant tout.

Avec la première catégorie, le référent AFEST pilotera le parcours comme une véritable équipe, en assurant intelligemment les régulations et les remédiations, ainsi que la réflexivité nécessaire à l’AFEST.

Un sachant non sensibilisé à la pédagogie peut non seulement dévier du parcours prévu, mais éprouvera également des difficultés dans sa posture d’accompagnateur (distanciation, centrage sur l’apprenant, la réflexivité).

Or, il est difficile de sensibiliser un expert dans une PME – sans parler de le former – sur les nécessités pédagogiques d’un tel parcours : « c’est pas vous qui allez m’apprendre mon métier ! ».

Pour respecter le parcours pédagogique prévu, la solution consiste à faire participer activement le commanditaire dans le suivi du parcours, en lui laissant le soin de recadrer l’expert le cas échéant.

Quant aux techniques pédagogiques, le référent peut insister à minima sur les impératifs contractuels de l’AFEST relatifs à la réflexivité, et superviser les séances d’analyses réflexives avec l’apprenant.

 

Le travail après l’AFEST   

 

L’AFEST permet d’accompagner efficacement les PME dans leurs enjeux de recrutement, d’intégration ou d’évolution de poste.

Et dans une optique d’amélioration continue, le référent doit préparer sa sortie pour que le collaborateur puisse continuer sa montée en compétences.

Pour ce faire, il faut que la PME continue à aménager une partie du temps de travail disponible du collaborateur – avec par exemple un parcours d’autoformation – en vue de continuer l’apprentissage.

A l’issue de l’AFEST, faute d’aménagement de son temps de travail, le collaborateur risque de reprendre les bonnes vieilles habitudes, et se contenter des comportements et apprentissages déjà acquis.

En conclusion, pour intégrer durablement l’AFEST dans la culture et dans le management d’une PME, il faut plus insister sur le « A » de l’Apprentissage que sur le « F » de la formation.